Derrière chaque innovation, il y a des histoires humaines, des rencontres, et souvent des paris un peu fous ! À l’occasion du lancement du nouveau site de Losonnante, ses fondateurs Olivier Lebas et Fabien Rolland partagent vision, anecdotes, réflexions personnelles et nous dévoilent les coulisses d’une aventure sonore hors du commun.
Vous croisez quelqu'un dans un train qui ne connaît pas Losonnante. Vous avez 30 secondes pour vous présenter. Que dites-vous à cette personne ?
Quand on lui demande de présenter Losonnante, Olivier sourit « Je commence par dire qu’on fabrique des appareils qui permettent d’écouter du son avec les coudes. Ça, ça va vite. Mais ensuite, je passe souvent une bonne demi-heure plutôt qu’une demi-minute à répondre aux questions qui suivent ! »
Fabien ajoute : « Nous proposons une solution sonore innovante qui permet d’écouter avec son corps, par conduction osseuse. Contrairement à l’écoute habituelle dans l’air, le son passe ici directement des coudes aux oreilles. L’expérience est vraiment immersive et personnelle, car seule la personne en contact avec le dispositif entend ce qui est diffusé. »
Qu'est-ce qui vous a donné envie de créer Losonnante ?
L’idée originale n’est pas née d’eux, mais d’un projet du CNRS en phase de recherche. Olivier raconte : « À l’époque, je travaillais pour un fabricant d’audioguides et quand j’ai entendu parler de cette innovation, je me suis dit que ce n’était pas possible, que ça ne marcherait jamais. Mais j’ai quand même eu envie d’essayer le prototype, par curiosité. Et là, je me suis rendu compte que j’étais formaté par les solutions existantes. Cette révélation m’a poussé à voir plus loin, à imaginer les potentiels. »
Fabien, lui, cherchait justement un projet entrepreneurial d’un genre nouveau : « Je voulais entreprendre, mais je n’avais pas encore trouvé la bonne idée. En voyant qu’Olivier cherchait un associé pour ce projet fou, j’ai été immédiatement intrigué. » Pour Fabien, il était aussi important de valider l’aspect humain : « Nous avons d’abord passé deux ou trois mois à collaborer sans engagement, juste pour voir si ça fonctionnait entre nous. Cette période fut décisive pour moi. »
Pourquoi avoir choisi exclusivement la conduction osseuse ?
Olivier précise immédiatement les choses : « Pour nous, la conduction osseuse n’est pas une fin technologique en soi car Losonnante est avant tout une réflexion sur l’usage du corps comme moyen de transmission. On aime explorer de nouveaux usages qui engagent le corps de différentes façons. Par exemple, nous développons actuellement un siège sur le même principe mais grâce à une position différente (la connexion se fait par l’arrière du crâne et non plus par les coudes), on s’aperçoit que beaucoup de choses changent même si on utilise toujours la conduction osseuse !»
Fabien complète en insistant sur l’aspect émotionnel et mémorable de l’expérience : « Quand on écoute en utilisant son corps, l’engagement est beaucoup plus fort, et cela crée des souvenirs durables. Nos clients, principalement dans le tourisme et la culture, y trouvent un moyen original de captiver leur public sans accessoires intrusifs. »
À quoi ressemblait votre tout premier prototype ?
A l’évocation de leurs débuts en 2015, Olivier sourit : « Le premier prototype, c’était essentiellement du carton et du balsa. Très artisanal ! Mais le principe fonctionnait déjà, ce qui était incroyable. »
Avec humour, Fabien se remémore les premiers jours : « La toute première version était ‘esthétiquement intéressante’ comme nous avions l’habitude de dire. Mais surtout, le son au début était à peine audible, et il a fallu beaucoup de travail de recherche et de développement pour parvenir à une qualité sonore satisfaisante. »
Pour tester l’appareil, ils utilisaient régulièrement la voix d’Emmanuel Macron : « Une voix médium idéale pour travailler la clarté et la compréhension, avec beaucoup de discours et donc de mots différents, dans plein de situations différentes, pour tester, tester et encore tester », explique Olivier. Le jour où le discours est devenu parfaitement audible et intelligible fut une étape marquante pour toute l’équipe.

Sur quel projet ou partenariat vous êtes-vous dit : 'Là, on a vraiment fait quelque chose de fort' ?
Sans hésiter, Olivier cite le Mont-Saint-Michel : « C’est un lieu mondialement connu. Une grande reconnaissance pour notre travail. La Cité des Sciences à Paris a aussi été un vrai défi technique à cause du bruit ambiant, ce qui nous a obligés à améliorer considérablement notre technologie. Aujourd’hui, cette exposition continue de voyager à l’international, notamment à Montréal et bientôt aux États-Unis. »
Fabien, lui, garde en mémoire des moments plus intimes : « Voir une personne sourde entendre avec notre dispositif, ou des adolescents totalement fascinés et engagés dans l’écoute. C’est dans ces moments-là qu’on se dit vraiment qu’on a fait quelque chose de significatif. »
Comment vos parcours respectifs se complètent-ils ?
Sur ce point, les deux amis s’accordent facilement. Olivier explique : « Fabien a un profil très commercial et financier, tandis que moi je suis davantage sur l’aspect technique du son. Mais dans une start-up, les rôles évoluent sans cesse et chacun doit être prêt à prendre des rôles nouveaux au fur et mesure de l’évolution du projet et l’arrivée de nouveaux talents. »
Fabien précise : « Sur le plan des caractères, Olivier réfléchit beaucoup sur le long terme, tandis que moi, je préfère agir rapidement et prendre des risques calculés. C’est justement cette complémentarité qui fait notre force. »
Quel a été votre plus gros défi à ce jour ?
Olivier répond du tac au tac : « Monter une entreprise dans le secteur du hardware en France reste extrêmement difficile. Industrialisation, financement, recrutement… Tout est complexe et nous devons constamment relever ces défis. »
Fabien renchérit : « De mon côté, le principal défi était de créer un marché pour une technologie que personne ne connaissait. Nous avons dû évangéliser, démontrer en permanence que ça fonctionnait vraiment. Aujourd’hui, grâce à nos références et réalisations, c’est devenu plus facile, mais ça reste un challenge permanent. »
Qu'est-ce qui vous anime aujourd'hui dans ce projet ?
Pour Olivier, c’est avant tout l’équipe : « Losonnante, c’est aussi une histoire d’amitié. Venir travailler avec des gens que j’apprécie vraiment, ça fait toute la différence. »
Fabien souligne quant à lui le plaisir entrepreneurial : « Transformer une simple idée en une réalité tangible est une sensation incomparable. J’aime profondément ce que je fais. Mon rêve serait que Losonnante devienne un jour une marque incontournable, un terme générique comme ‘frigo’ ou ‘mobylette’. »
Qu'est-ce qui vous surprend encore dans les réactions du public ?
Olivier est encore et toujours surpris par la réaction des gens : « À chaque fois que je vois une personne essayer Losonnante pour la première fois, son sourire, son étonnement sincère me donnent une énergie incroyable. Ça efface tous mes doutes et ça me rebooste complètement. »
Et le public le leur rend bien car Fabien ajoute : « Je suis toujours surpris par la créativité des utilisateurs. Ils nous donnent souvent des idées auxquelles nous n’aurions jamais pensé. »
Quelle question vous pose-t-on tout le temps et que vous aimeriez reformuler ?
Ils répondent ensemble : « Est-ce que ça marche avec les sourds ? » Olivier précise : « Cette question revient systématiquement car les gens associent la conduction osseuse aux prothèses auditives. Mais notre objectif est beaucoup plus large, nous voulons changer profondément la façon dont tout le monde écoute et perçoit les sons. »
Fabien complète avec une autre question fréquente : « On nous demande souvent si on peut utiliser d’autres parties du corps. La réponse est oui, tant qu’il y a continuité osseuse. La preuve avec notre projet de siège audio dont nous parlions plus haut et qui verra le jour dans les prochains mois. »
Si vous deviez rêver grand, où voyez-vous Losonnante dans 10 ans ?
Pour Olivier, le rêve serait d’écouter des récits et des musiques en lien direct avec les paysages traversés, par exemple en TGV. Fabien voit plus large encore : « J’aimerais que Losonnante contribue à valoriser l’identité sonore de territoires partout dans le monde, grâce au pouvoir de l’émotion et de la mémoire auditive. »
Portée par deux passionnés déterminés à révolutionner notre rapport au son, l’aventure Losonnante n’en est qu’à ses débuts.

